Dimanche 17 décembre
Cette semaine mon coeur penche sans hésiter pour la première lecture. D’autant plus que l’évangile est très proche de celui de la semaine dernière. Nous retrouvons Isaïe… C’est quand même fou qu’un beau dimanche de décembre, en 2017, dans toutes les églises à travers le monde, on écoute des paroles qui ont traversé quelques vingt-huit siècles pour parvenir jusqu’à nous. Comme si le temps et l’espace, à travers ce texte, fusionnaient devant nos yeux pour former quelque chose d’impalpable : l’éternité, l’infini?
Lecture du livre du prophète Isaïe (61, 1-2a. 10-11)
L’ esprit du Seigneur Dieu est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé annoncer la bonne nouvelle aux humbles, guérir ceux qui ont le cœur brisé, proclamer aux captifs leur délivrance, aux prisonniers leur libération, proclamer une année de bienfaits accordée par le Seigneur. Je tressaille de joie dans le Seigneur, mon âme exulte en mon Dieu. Car il m’a vêtu des vêtements du salut, il m’a couvert du manteau de la justice, comme le jeune marié orné du diadème, la jeune mariée que parent ses joyaux. Comme la terre fait éclore son germe, et le jardin, germer ses semences, le Seigneur Dieu fera germer la justice et la louange devant toutes les nations.
Je tressaille de joie, mon âme exulte… Ces deux mots expriment la même chose : sauter, sursauter, bondir…donc c’est fort et ça secoue. Isaïe, on l’a dit, n’est pas un extra-terrestre, mais un homme qui a vécu une vie comme vous et moi, ce qui veut dire que cette exultation est humaine, à la portée de chacun. Au moment où j’écris, j’essaie de me rappeler la dernière fois que j’ai ressenti, moi aussi, cette vague déferlante - ou ce mouvement intérieur imperceptible - qui emporte tout et fait exploser la poitrine. Ce qui me rassure, c’est que, de fait, je vois de quoi il parle, donc j’ai déjà ressenti cela.
Et vous? Tressaillez-vous souvent de joie?
De mon côté, je vais être honnête, ce n’est pas l’émotion la plus fréquente de la journée. Si je devais définir le phénomène, je dirais que c’est rare, fugace, insaisissable, imprévisible…Et pourtant, aussi rare et fugace que cela soit, j’ai l’impression qu’il en reste toujours une petite trace quelque part, et si je me concentre un instant, j’en récupère des miettes. Si je me concentre un instant…c’est à dire si je sors de l'état de somnolence caractéristique de ma condition humaine! (cf. dimanche 3 décembre)
Donc Isaïe nous explique comment ca marche pour lui. Clairement, quand il est dans cet état d’être, il se sent en union totale avec « le Tout Autre » (je préfère utiliser ces trois mots, car il y en a pour qui le mot « Dieu » ferme tout à double tour). Ensuite, il se sait porter le salut et la justice…soit encore, il sait qu’il « chante juste » à des hauteurs qui font qu’il ne tombera plus. Mais de toute évidence, cela ne vient pas de lui, il sait que cela lui a été donné et il le porte comme un vêtement. Ce vêtement, il le connait et le nomme : l’esprit du Seigneur. Et donc, des siècles avant que Jean-Baptiste l’ait annoncé, (cf. dimanche dernier), il sait lui ce que c’est, le baptême dans l’Esprit.
Résumons : ce don de l’esprit qu’il a reçu fait qu’il est en communion totale avec « le Tout Autre » et la conséquence dans sa vie de tous les jours est qu’il est porté par cette énergie de joie incroyable. Autre conséquence, recevoir ce don-là, c’est aussi forcément se sentir appelé à partager, à annoncer, à guérir, à libérer… Comme si ce don-là on ne pouvait absolument pas le garder pour soi. Impossible!
Ce que j’en conclue, c’est que sentir cette joie immense en soi et avoir une envie irrépressible de la partager est un signe clair de la présence de l’Esprit en nous. C'est quand même bien de le savoir...Inversement, quand on est englué dans une humeur morne, clairement, il n’est pas là. Du moins, on a coupé le courant.
Mais ce que je préfère encore, c’est la promesse qui se trouve à la fin du texte…et l’espérance qui va avec. Comme la terre fait éclore son germe, et le jardin, germer ses semences… : voilà, c’est dit comme une loi : une semence germe, et ne peut pas ne pas germer. Cette graine de justice et de salut est plantée en chaque homme, c’est ce fameux « True self ». Et cette graine ne peut que germer et grandir…Est-il possible de l’empêcher de grandir? Je ne crois pas. Même si c’est micron par micron, elle travaille en nous. Ou alors nous ne sommes pas de l’espèce « humaine ».
Ce dimanche s’appelle « Gaudete », dimanche de la joie. Comment ne pas être dans la joie, quand on connait l’existence de cette graine? Si on interroge l’enfant qui est en nous, nul doute que lui sait la retrouver et lui laisser sa place.
Episodes précédents :
1. Dimanche 3 décembre : Rester éveillé
2. Dimanche 10 décembre : Préparer le chemin…Parlez-vous javanais?
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